Le représentant syndical au Comité d’entreprise

, par udfo53

Avant la loi du 20 août 2008, seules les organisations syndicales représentatives pouvaient désigner un représentant syndical (RS) au comité d’entreprise, sans aucune condition.

Depuis la loi portant rénovation de la démocratie sociale, de nouvelles règles sont venues régir les conditions de désignation des représentants syndicaux au comité d’entreprise.

Dans les entreprises de plus de 300 salariés

Article L2324-2 : « Sous réserve des dispositions applicables dans les entreprises de moins de trois cents salariés, prévues à l’article L. 2143-22, chaque organisation syndicale ayant des élus au comité d’entreprise peut y nommer un représentant. »

Le Code du travail exigeant que le syndicat ait « des élus » au sein du comité d’entreprise pour pouvoir y désigner un RS, la Cour de cassation en déduit qu’il faut au moins deux élus (Cass.Soc., 21 octobre 2009, n° 09-60.090).

Dans les entreprises de moins de 300 salariés

Article L2143-22 : « Dans les entreprises de moins de trois cents salariés et dans les établissements appartenant à ces entreprises, le délégué syndical est, de droit, représentant syndical au comité d’entreprise ou d’établissement. »

La circulaire de la DGT n°20 du 13 novembre 2008 précise quant à elle que « dans les entreprises de moins de 300 salariés, le délégué syndical reste, en tout état de cause, RSCE de droit ».

On peut donc en conclure que la règle exigeant que, pour pouvoir désigner un Représentant Syndical au CE il faut au moins deux élus au CE est une règle propre aux entreprises de plus de 300 salariés, et qu’en dessous de ce seuil, aucune condition ne subordonne la présence du délégué syndical au CE en tant que représentant syndical.

Application de la loi dans le temps Ces nouvelles dispositions sont applicables depuis le 22 août 2008 (Cass.soc., 8 juillet 2009, n°09-60.015), ce qui signifie les mandats de RS au CE en cours subsistent (circulaire de la DGT du 13 novembre 2008). Toutefois, en cas démission d’un RS, la loi est applicable quand bien même il n’y a pas eu de nouvelles élections. Si l’organisation syndicale souhaite désigner un remplaçant, elle doit alors remplir les conditions imposées par la loi nouvelle, à savoir avoir au moins deux élus au CE.

1. La désignation du Représentant Syndical au CE

On n’aura pas manqué de constater qu’il n’est plus fait aucune référence à la qualité de syndicat représentatif…

A ce propos, la Cour de cassation a confirmé que la condition d’avoir des élus au sein du CE est une condition suffisante selon la loi (« les nouvelles dispositions de l’article L. 2324-2 du code du travail, applicables à compter du 22 août 2008, donnent le droit à chaque organisation syndicale ayant des élus, sans autre condition, de désigner un représentant syndical au comité d’entreprise ou d’établissement », Cass.soc., 8 juillet 2009, n°09-60.015).

Un accord collectif ne peut d’ailleurs pas déroger à ce principe.

« Les nouvelles dispositions de l’article L.2324-2 du Code du travail sont applicables à compter du 22 août 2008, aux désignations des représentants syndicaux tant au comité d’entreprise qu’au comité d’établissement. L’accord d’entreprise se référant à une condition de représentativité syndicale est contraire aux dispositions de ce texte, qui impose uniquement d’avoir des élus au comité d’entreprise » (Cass.soc. 10 mars 2010 n° 09-60.282).

A NOTER : Peu importe que le syndicat soit ou non représentatif, l’élément déterminant est bien le nombre d’élus au CE.

Claire incohérence de la loi du 20 août 2008 pour une organisation syndicale représentative qui n’a pas d’élus au CE, donc ne peut pas désigner de RSCE, alors qu’elle détient les prérogatives en matière de négociations collectives. Dans le même temps, une organisation syndicale non représentative qui a des élus au CE peut désigner un RS, bien que privée du pouvoir de négociation dans l’entreprise.

PROTOCOLE D’ACCORD PREELECTORAL : NOMBRE DE SIEGE AU CE

Par ailleurs, le nombre de sièges au CE prévu par un protocole d’accord préélectoral peut être plus favorable que les dispositions légales. Cependant, selon la Cour de cassation, un protocole d’accord préélectoral ne permet pas d’établir l’effectif de l’entreprise et peut prévoir un nombre de sièges supérieur à ce que prévoit la loi.

« Le nombre de sièges au CE prévu par un protocole d’accord préélectoral, qui peut être plus favorable que les dispositions légales, ne permet pas de déterminer l’effectif de l’entreprise. Un syndicat ne peut désigner un représentant syndical au CE , distinct du délégué syndical, tel que prévu dans les entreprises de moins de 300 salariés, en se fondant sur le nombre de sièges au CE fixé dans le protocole préélectoral et correspondant à un effectif de 400 salariés. Il résultait en effet du tableau d’évolution des effectifs de l’association du 31 décembre 2007 au 31 décembre 2008 que cet effectif était inférieur à 300 salariés. » (Cass.soc. 31 mars 2010, n°09-60.361).

En l’espèce, si l’accord prévoyait bien un nombre de sièges correspondant à un effectif de 400 salariés, c’est l’effectif réel qu’il fallait prendre un compte, à savoir moins de 300 salariés.

2. Le cas des syndicats ayant fait liste commune

Peut se poser la question du nombre de RS au CE en cas de listes communes.

Dans ce cas, la Cour de cassation reprend les termes de l’article L. 2122-3 du Code du travail :

« En cas de constitution d’une liste commune pour les élections au comité d’entreprise ou d’établissement, le nombre d’élus obtenu par chaque organisation syndicale s’apprécie sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste et, à défaut, se répartit par parts égales entre les organisations concernées » (Cass.soc. 4 novembre 2009, n° 09-60.066).

Ainsi, en l’absence d’accord de répartition, deux syndicats ayant fait liste commune peuvent désigner chacun un représentant syndical au CE si chaque syndicat peut revendiquer 2 élus au CE, dans les entreprises de plus de 300 salariés (à noter qu’en l’espèce, les deux syndicats avaient obtenu 4 sièges, 2 titulaires et 2 suppléants).

Toutefois, on peut s’interroger sur le cas où une liste commune à deux syndicats n’obtient que 3 élus. Elle perdrait, dans ce cas, le bénéfice d’un représentant syndical au CE, à moins que la Cour de cassation n’admette la désignation d’un représentant syndical commun à la liste commune. Et si tel est le cas, quelle serait l’organisation syndicale habilitée à désigner un RS ?

Des questions parmi tant d’autres, qui demeurent pour l’instant sans réponse face à un vide juridique certain, dû aux (trop) nombreuses lacunes que présente la loi du 20 août 2008.

3. Durée du mandat du RS au CE

Auparavant, le représentant syndical au CE avait un mandat à durée indéterminée. Le mandat prenait fin en cas de révocation de ma part de l’organisation syndicale qui l’avait désignée, en cas de démission ou en cas de rupture du contrat de travail.

Désormais, selon la Haute juridiction, dans les entreprises de plus de 300 salariés, « le mandat de représentant syndical au comité d’entreprise prend fin lors du renouvellement des membres de cette institution » (Cass.Soc., 10 mars 2010, n° 09-60.347).

Dans les entreprises de moins de 300 salariés, ce sont les délégués syndicaux qui occupent automatiquement la fonction de RS au CE (art. L.2143-22 C.trav.). Ce mandat prend donc inévitablement fin en même temps que celui de délégué syndical lorsque le salariés n’a pas obtenu le score de 10% lors des élections suivante ou lorsque l’organisation syndicale qui l’a désigné ne rempli plus les nouveaux critères de représentativité (art. L. 2143-11 C.trav.).

4. Le RS au Comité Centrale d’Entreprise

Selon l’article L.2327-6 du Code du travail : « Chaque organisation syndicale représentative dans l’entreprise désigne un représentant au comité central d’entreprise choisi soit parmi les représentants de cette organisation aux comités d’établissement, soit parmi les membres élus de ces comités. »

La loi du 20 août n’a pas modifié cette disposition légale.

Ainsi, le RS au CCE n’a pas à être choisi parmi les candidats aux élections des comités d’établissement ayant obtenus au moins 10% sur leur nom et il n’est pas exigé d’avoir au moins 2 élus au CCE pour y désigner un RS.

Par contre, le syndicat doit être représentatif dans l’entreprise pour pouvoir désigner un RS au CCE et celui-ci doit être : RS à l’un des comités d’établissement, Ou élus à l’un de ces comités.

Conclusions

Si ces nouvelles règles de désignation jettent incontestablement un trouble sur l’accès des organisations syndicales au comité d’entreprise, la Cour de cassation, en son Assemblée Plénière, à néanmoins jugé que « subordonner la désignation d’un représentant syndical au comité d’entreprise à la condition pour un syndicat d’y avoir des élus ne porte atteinte à aucun des droits et libertés garantis par la Constitution » (Cass. Ass.plèn. 18 juin 2010 – 10-14749 (QPC) ).