ABATTOIRS DE VOLAILLES:La folie des cadences

, par udfo53

Le groupe Doux est leader français sur le marché de la volaille. Il possède aussi des usines au Brésil et en Allemagne, au grand dam des salariés français. Nadine Hourmant, déléguée syndicale et secrétaire du Comité d’Entreprise du site de Châteaulin (Finistère), mais aussi déléguée syndicale centrale au niveau du groupe, témoigne que la pénibilité n’y est pas un vain mot.

Pour bien comprendre ce qu’est la pénibilité dans notre entreprise, il faut savoir que, de l’arrivée des bêtes vivantes jusqu’à leur départ sous forme de produits surgelés, nous traitons 375.000 poulets par jour. Notre employeur envisage même de passer à 450.000 à partir de janvier 2011, ce qui entraînerait une réorganisation du travail avec soit la création d’une équipe de nuit, soit une semaine rallongée avec le travail du samedi, et tout ça pour le SMIC ou à peine plus.

L’abattage : beaucoup d’intérimaires

Les volailles vivantes arrivent dans des conteneurs vidés automatiquement sur des tapis. Les accrocheurs les placent sur des potences où elles reçoivent une décharge électrique. Ensuite, viennent le saignage, le déplumage puis l’éviscération, des opérations semi-automatiques.

Ce travail est très dur. Les opérateurs occupent une position “assise- debout” mais ont la plupart du temps les bras levés pour procéder à l’accrochage. La pénibilité est telle que cette tâche est le plus souvent effectuée par des intérimaires. Alors que l’ancienneté moyenne dans l’entreprise est de vingt ans, les accrocheurs, eux, restent environ un an puis trouvent un autre emploi.

L’emballage : des cadences folles

C’est à ce poste que Nadine Hourmant travaille. Les poulets arrivent sur la chaîne, tombent dans une case d’où les salariés les placent dans une emballeuse. Puis, par un tapis, ils vont vers une autre salariée qui les met en cartons.

“Les cadences sont folles puisque chacune d’entre nous doit traiter 14 poulets à la minute pour l’emballage manuel, et à la mise en cartons près de 1.000 bêtes à l’heure. Nous travaillons à température ambiante puisque les locaux ne sont pas climatisés. Nous subissons donc tous les aléas du temps : froid en hiver, chaleur en été.”

Le plus difficile, ce sont les actes répétitifs à cadence élevée. Les épaules et les bras sont très sollicités, ce qui conduit à des tendinites des coudes ou des poignets. Quand la douleur est trop forte, il n’y a plus qu’une solution : s’arrêter, avec une prise de médicaments en premier et, en cas de persistance, des infiltrations avant de repartir au travail. une partie importante du personnel vit en permanence sous médicaments pour pouvoir surmonter la douleur et garder son emploi.

une fois emballés, les poulets passent plus de huit heures en tunnel de surgélation puis les cartons, pesant 13 à 14 kg chacun, sont mis sur des palettes pouvant monter jusqu’à 1,80 m de hauteur, ce qui occasionne encore maux de dos ou autres désagréments physiques.

Un bilan sanitaire inquiétant

Il ne faut pas s’étonner, dès lors, d’un nombre d’arrêts de travail important. Par exemple, de 2004 à 2009, le nombre de jours d’absence pour accident du travail ou maladie professionnelle a tourné, selon les années, entre 3,3 et 4,3%. Pire encore, sur la même période, le taux d’absentéisme pour maladie a oscillé entre 8,1 et 10,8%. De plus chaque année, l’entreprise procède à des licenciements pour inaptitude au travail : 17 en 2005, 11 en 2008, 6 en 2009.

Depuis quelques années l’employeur commence à se rendre compte qu’il y a un problème. Il y a un peu plus d’écoute sociale. L’entreprise veut garder les gens en poste. C’est pourquoi un accord “Handicap et seniors” a été signé, prévoyant des aménagements de postes et des maintiens dans l’emploi. Mais il y a fort à parier qu’avec le recul de l’âge de départ en retraite, il va falloir bientôt revoir cet accord et donc son contenu !