Négociations collectives : qui participe aux négociations dans les entreprises d’au moins 50 salariés ?

, par udfo53

L’article L.2232-17 du code du travail dispose : « La délégation de chacune des organisations représentatives parties à des négociations dans l’entreprise comprend le délégué syndical de l’organisation dans l’entreprise ou, en cas de pluralité de délégués, au moins deux délégués syndicaux.

Chaque organisation peut compléter sa délégation par des salariés de l’entreprise, dont le nombre est fixé par accord entre l’employeur et l’ensemble des organisations mentionnées au premier alinéa. A défaut d’accord, le nombre de salariés qui complète la délégation est au plus égal, par délégation, à celui des délégués syndicaux de la délégation. Toutefois, dans les entreprises pourvues d’un seul délégué syndical, ce nombre peut être porté à deux ».

Cet article qui organise la composition de la délégation syndicale dans l’entreprise vient de faire l’objet d’un arrêt de la Cour de cassation[1] mais reste silencieux sur la délégation patronale.

Un rappel des règles s’avère nécessaire.

[1] Cass. Soc. 5-1-11, n°09-69732.

Composition de la délégation patronale

En raison du silence des textes, les employeurs s’octroyaient fréquemment le droit de se faire assister par des conseillers extérieurs à l’entreprise.

Face à cette pratique courante dans les années 90, nous avions interrogé le ministère du travail qui avait prôné une sorte de parallélisme de composition des différentes délégations.

Ainsi, rien ne valait un accord sur la composition, ce qui pouvait éviter tout malentendu.

A défaut, le ministère distinguait la présence de collaborateurs salariés de l’entreprise de la présence de personnalités extérieures, telles que des avocats, juristes ou experts.

1 - Les collaborateurs salariés

« Il serait contraire au principe d’équilibre nécessaire entre les parties à la négociation de contraindre l’employeur à se trouver seul face à une délégation syndicale pouvant comprendre de nombreux délégués »[1].

Le ministère ne concluait pas à un système de paritarisme - propre aux instances de négociations extérieurs à l’entreprise - , mais à une sorte de bon sens permettant à l’employeur de se faire assister par des collaborateurs pouvant éclairer les discussions par leurs connaissances.

[1] « L’employeur peut-il se faire assister par un expert extérieur à l’entreprise lors des négociations ? »

2 - Les personnalités extérieures

Par contre, la présence de personnalités extérieures à l’entreprise doit obligatoirement être soumise à un accord avec les délégués syndicaux.

Dans ce cas, les délégués syndicaux pourraient également se faire assister par des personnes extérieures à l’entreprise.

Composition de la délégation syndicale

Pour rappel, seules les organisations syndicales représentatives sont habilitées à négocier, c’est-à-dire celles qui ont obtenu au moins 10% aux dernières élections professionnelles du comité d’entreprise, de la délégation unique du personnel ou, à défaut des délégués du personnel, ce qui leur a permis de désigner un délégué syndical.

1 - Le nombre de délégués syndicaux appelés à négocier

La loi dispose que la délégation syndicale est composée du délégué syndical et qu’en cas de pluralité de délégués syndicaux, la délégation comprend au moins deux délégués syndicaux.

« Au moins deux » constitue-t-il un minimum légal ou un maximum légal pouvant être augmenté par accord ?

Autrement dit, le nombre de délégués syndicaux peut-il être augmenté par simple décision du syndicat, ou nécessite-t-il un accord avec l’employeur ?

On pouvait se poser la question puisque la nécessité d’un accord semble, selon l’écriture de l’article L.2232-17 du code du travail, ne s’appliquer qu’au nombre de salariés pouvant compléter les délégations syndicales.

C’est la question qui a été posée à la Cour de cassation dans l’arrêt du 5 janvier 2011.

En effet, au cours d’une négociation d’entreprise, chaque syndicat avait composé sa délégation de tous les délégués syndicaux désignés dans l’entreprise. L’employeur saisit donc le tribunal.

La cour d’appel interprète de manière extensive l’article L.2232-17 du code du travail : "au moins deux " signifie que le nombre de délégués syndicaux peut être augmenté sans accord de l’employeur.

Ce qui n’est pas prohibé serait donc permis !

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel par un attendu de principe qui ne laisse aucune place à interprétation :

« Attendu qu’aux termes de ce texte, la délégation de chacune des organisations représentatives parties à des négociations dans l’entreprise comprend le délégué syndical de l’organisation dans l’entreprise ou, en cas de pluralité de délégués, au moins deux délégués syndicaux ; que chaque organisation peut compléter sa délégation par des salariés de l’entreprise, dont le nombre est fixé par accord entre l’employeur et l’ensemble de ces organisations ; qu’à défaut d’accord, le nombre de salariés qui complètent la délégation est au plus égal, par délégation, à celui des délégués syndicaux de la délégation ; que toutefois, dans les entreprises pourvues d’un seul délégué syndical, ce nombre peut être porté à deux ; qu’il en résulte qu’en cas de pluralité de délégués syndicaux, et sauf accord plus favorable conclu entre l’employeur et l’ensemble des organisations participant à la négociation, la délégation de chaque organisation est légalement composée de deux d’entre eux, et éventuellement complétée par un nombre égal de salariés ».

Par cet arrêt, la Cour de cassation impose aux organisations syndicales de choisir, parmi les délégués syndicaux désignés, ceux qui participeront à la négociation ou de négocier un accord avec l’employeur.

2 - Les salariés complétant la délégation

Chaque délégation syndicale peut compléter sa délégation de salariés de l’entreprise en nombre égal à celui de délégués syndicaux par organisation syndicale.

Ainsi, pour deux délégués syndicaux participant à la négociation, l’organisation syndicale peut demander à deux salariés de compléter sa délégation.

Rien, à notre avis, n’empêchera le syndicat de choisir les deux salariés pouvant compléter la délégation en vertu du second alinéa de l’article L. 2232-17 du code du travail, parmi les autres délégués syndicaux non pris.

Un délégué syndical est aussi un salarié de l’entreprise !