, par udfo53

FO n’est pas signataire de l’accord national interprofessionnel sur la compétitivité et la sécurisation de l’emploi. Nous considérons en effet que cet accord est destructeur de droits pour les salariés.

Les avancées annoncées sont aléatoires ou tout de suite contournées. De fait, le patronat sort vainqueur.

Retrouvez ci-dessous les points essentiels pour lesquels FO n’a pas apposé sa signature.

Diffusez notre analyse, discutez-en avec vos collègues. De notre côté, nous intervenons auprès du gouvernement et de tous les groupes parlementaires.

1 - FACILITER LES LICENCIEMENTS AU MOINDRE COÛT

 Suppression du PSE

Avec l’article 20 (« Règles relatives au licenciement de 10 salariés et plus... »), l’accord supprime purement et simplement deux sections du Code du travail relatives aux protections des salariés en cas de licenciement économique ! Elles seront remplacées « soit par un accord collectif majoritaire, soit par un document produit par l’employeur et homologué par le Direccte* ». Avec la procédure d’homologation l’employeur pourra établir directement son propre document, faisant office de PSE (Plan de sauvegarde de l’emploi), et ainsi décider unilatéralement des délais de consultation, de la possibilité ou non du recours à un expert, des modalités, critères et conditions de reclassements éventuels, du contenu et du niveau des aides à l’accompagnement. La responsabilité des dispositions appliquées relèvera de l’administration. Or, alors que celle-ci souffre du manque de moyens consécutif aux restrictions budgétaires et aux suppressions d’emplois, une non-réponse dans le délai de 21 jours vaudra acceptation !

 La compétence comme critère de licenciement

En établissant que « l’employeur est fondé, pour fixer l’ordre des licenciements, à privilégier la compétence professionnelle », l’accord met quasiment à bas les critères protecteurs et objectifs (charge de famille, ancienneté, caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle difficile, qualité professionnelle appréciée par catégorie) que la loi imposait jusqu’à maintenant. Les salariés, dans une telle situation, se trouveront confrontés à une loterie arbitraire et cruelle (comment et par qui s’évalue une compétence dont l’évaluation est la plus subjective) là où, dans une situation forcément douloureuse, on s’attachait jusqu’alors à protéger les salariés les plus fragiles et qui se trouveront en plus grande difficulté pour re-trouver un emploi, indépendamment de leur compétence.

 Mobilité interne

Alors que la mobilité interne fait déjà partie des éléments de la GPEC (Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences), l’article 15 la transforme en un élément déguisé –mais qui ne trompe pas celui qui sait lire– de ce qui relevait d’un PSE. Tout est dans son dernier alinéa. Il qualifie de « personnel » un motif de refus d’une modification du contrat du salarié, motif qui relève en réalité d’une réorganisation pour une raison économique. L’employeur pourra ainsi contourner les obligations qui étaient les siennes jusqu’alors en cas de licenciement économique (PSE).

*Directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi.

2 - SÉCURISER L’EMPLOYEUR QUI LICENCIE AU DÉTRIMENT DES DROITS DES SALARIÉS

Avec trois articles consacrés à la sécurisation des procédures de licenciement, c’est encore « tout pour l’employeur », les salariés étant ici totalement perdants !

 L ’article 24 ouvre un processus destiné à protéger les employeurs d’une jurisprudence, protectrice du salarié, qui assimile une motivation imprécise de licenciement à une absence de motif. Autrement dit, l’employeur bénéficie de la présomption d’incompétence qui devient a contrario pour le salarié un critère de licenciement !

 L’article 25, qui peut apparaître comme répondant au principe du dialogue social et à la raison –que les employeurs recourent plus systématiquement à la conciliation dans le cadre des prud’hommes–, conduit, sous ce prétexte, à établir un barème, qui risque fort de devenir une norme, inférieure à l’indemnité légale prévue aujourd’hui (4 mois au lieu de 6 mois pour 2 ans d’ancienneté), à laquelle se référeront les juges. Le dernier alinéa porte de graves conséquences puisqu’il permettra à l’employeur d’invoquer, devant le juge, des « éléments » qui ne figuraient pas forcément dans la lettre de licenciement et face auxquels le salarié n’a donc pas pu se défendre. Sur cet aspect il s’agit d’un retour de la volonté de contourner les obligations liées à la motivation préalable découlant notamment de la convention 158 de l’OIT (Organisation internationale du travail), qui avait conduit à l’annulation du CNE (Contrat nouvelles embauches) à la suite d’une plainte de FO.

 Enfin, l’article 26 conduit simplement à spolier, dans certaines situations, les salariés de la possibilité de faire reconnaître et réparer leurs droits en raccourcissant les délais de prescription (de 5 ans à 24 mois, pour ce qui concerne le droit du travail, et de 5 ans à 36 mois pour les salaires. Il ne faut pas oublier ici qu’il s’agit du temps qui est donné à un salarié, qui n’est évidemment pas forcément le mieux armé en la matière, pour s’apercevoir ou comprendre que ses droits n’ont pas été respectés

3 - MAINTIEN DANS L’EMPLOI CONTRE RÉDUCTION DE SALAIRE

La flexibilité, c’est maintenant !

Un des articles phares de l’accord est l’article 18 : « Accords de maintien dans l’emploi ».

Même débarrassé de l’appellation « compétitivité emploi », devenue sulfureuse, et bien que paré d’apparentes précautions (transparence de l’information, durée maximale de deux ans, accords majoritaires), il établit le cadre des accords d’entreprises ajustant les droits des salariés aux besoins des entreprises (y compris par une baisse du salaire net de base).

Le « garde-fou » de l’accord majoritaire se transforme en logique destructrice de droits en étant opposable aux droits individuels du salarié :

 l’accord vaudra cause réelle et sérieuse de licenciement. En cas de refus du salarié de subir une modification pourtant majeure de son contrat de travail, il se verra spolié des droits liés à son contrat ; les syndicats signataires d’un tel type d’accord participeront ainsi eux-mêmes à cette remise en cause de droits individuels ;

 « l’entreprise est exonérée de l’ensemble des obligations légales et conventionnelles qui auraient résulté d’un licenciement collectif pour motif économique », autrement dit pas de PSE (plan de sauvegarde de l’emploi) ni d’obligation de reclassement, l’ajustement à la baisse des droits des salariés en faisant office.

Étonnamment, les employeurs ont tellement confiance dans l’efficacité de ce processus qu’ils ont prévu, dans une annexe, la possibilité de dénoncer l’accord, pourtant à durée déterminée plafonnée à deux ans (ce qui, au demeurant, introduit une nouvelle dérogation au Code du travail). En matière de sécurisation on était en droit d’attendre mieux !

4 - UNE LOGIQUE NÉFASTE

La négociation qui a conduit à l’accord interprofessionnel conclu le 11 janvier dernier, dit « compétitivité des entreprises et sécurisation de l’emploi », vient de la tentative de négociation ouverte le 17 février 2012, à la demande du gouvernement d’alors, appelée « accords de compétitivité emploi » et interrompue par l’élection présidentielle.

Dès l’origine FO avait mis en garde sur la logique présidant à cette négociation.

Aujourd’hui, le résultat est jugé, non seulement par FO mais par nombre de commentateurs, déséquilibré, voire très déséquilibré, en faveur de la flexibilité pour peu ou pas de sécurisation.

En ce sens, il s’inscrit dans la droite ligne des politiques pour l’emploi, faisant du coût et de la flexibilité du travail la variable d’ajustement de la compétitivité des entreprises : désindexation des salaires, suppression de l’autorisation administrative de licenciement, allégements de cotisations sociales pour les entreprises, possibilité de déroger dans les entreprises aux garanties négociées dans les branches.

Autant de mesures qui se sont succédé sans que les centaines de milliers d’emplois promis à chaque fois ne se concrétisent. S’il demeure en l’état, cet accord viendra s’ajouter à la (longue) liste noire des dispositifs néfastes pour l’emploi.