> RAPPORT GALLOIS : POUR JEAN-CLAUDE MAILLY, « IL N’Y A PAS DE PROBLÈME DE COÛT DU TRAVAIL »

, par udfo53

Alors que le commissaire à l’investissement Louis Gallois remet ce lundi matin son rapport à Jean-Marc Ayrault, Jean-Claude Mailly refuse que le débat sur la compétitivité s’engage sur la question du coût du travail.

Article publié dans le journal "Le Parisien" du 5 novembre 2012

Qu’attendez-vous du rapport Gallois ? Jean-Claude Mailly : Qu’il mette l’accent sur la compétitivité dite « hors coût ». Autrement dit, sur tout ce qui touche à l’innovation, à l’investissement, à la recherche, à la stratégie industrielle, au rôle des banques vis-à-vis des entreprises. Les difficultés de l’économie française et d’une partie de l’industrie viennent de là. Or je crains que l’objectif principal de ce rapport soit un nouveau plaidoyer en faveur d’un transfert massif des cotisations sociales des employeurs vers les Français. Alors qu’il n’y a pas de problème de coût du travail.

Le patronat et un certain nombre d’économistes affirment pourtant le contraire… Cette logique est inacceptable. Concrètement, ça veut dire quoi ? Qu’il faut rogner systématiquement sur le système de protection sociale et sur le niveau des salaires pour être compétitif. Ceux qui prônent ça, c’est-à-dire une partie du patronat, la Commission européenne et l’OCDE, nous ont déjà envoyés dans le mur de la crise. C’est faire une erreur de diagnostic économique. Le coût du travail dans l’industrie, en France et en Allemagne, est quasiment le même. Ce qui fait la différence, ce sont les gammes de produits, le tissu industriel, la stratégie, l’accès au financement. Voilà pourquoi ils sont meilleurs que nous.

Qu’attendez-vous du gouvernement ? Qu’il ait une position claire, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. C’est à François Hollande et à son gouvernement de faire un choix. Demain, on aura les premiers éléments. Ça va être l’heure de vérité. S’ils se contentent d’être « les gestionnaires honnêtes et loyaux des affaires du capitalisme », comme disait Léon Blum, il y aura un fort désaccord. Et, s’il faut mobiliser, on n’hésitera pas !

François Hollande a déjà recadré le débat en parlant de « pacte » de compétitivité et non plus de choc. Ça va dans le bon sens ? Ça veut dire quoi, un pacte ? Qu’on va être tous d’accord ? Sur la question de la compétitivité, il y a eu débat il y a trois ans entre le patronat et les syndicats. Mon organisation a refusé de signer le document justement parce qu’il y avait la question du coût du travail. Il y a des divergences. Et je ne vois pas comment on peut y arriver.

Quelles mesures emporteraient le soutien de FO ? Des réponses sur les relations des donneurs d’ordre avec leurs sous-traitants ou sur la stratégie industrielle de l’Etat. Quand on demande aux petites entreprises quel est leur principal souci aujourd’hui, elles répondent : la relation avec leur banquier. C’est ça la réalité de tous les jours. François Hollande avait aussi annoncé un impôt sur les bénéfices des sociétés, modulé selon qu’elles les réinvestissent ou les redistribuent à leurs actionnaires. Voilà des pistes à creuser si l’on veut améliorer sur le fond la compétitivité des entreprises françaises.

Faire appel à Louis Gallois, était-ce une erreur de casting ? Ne l’oublions pas, il a été lui-même employeur. Chez EADS, il avait mis en place un plan baptisé Power Eight, qui avait généré quelques mouvements sociaux.

Propos recueillis par C.G. et publié le 05.11.2012, dans Le Parisien