EGALITE PROFESSIONNELLE Les fondements juridiques

, par udfo53

Dans le passé, les textes permettaient un traitement différencié entre le travail des hommes et celui des femmes, avec globalement un statut n’assurant pas à la femme une pleine capacité juridique.

Certaines dispositions apparues sous la IIIème république se voulaient plus protectrices des femmes. Ainsi elles ont longtemps été « protégées » contre certains types d’activités au même titre que les jeunes travailleurs de moins de 18 ans. L’interdiction du travail de nuit pour les femmes et les jeunes de moins de 18 ans est sans doute la mesure la plus emblématique de ce type de disposition.

La suppression de l’interdiction du travail de nuit des femmes dans l’industrie en 2001 – mise en conformité avec le droit européen - illustre le droit nouveau qui affirme une stricte égalité professionnelle Homme/Femme dans l’emploi. L’égalité : un droit fondamental

L’égalité est un droit fondamental inscrit dans de nombreux textes de référence qu’il s’agisse :

• Du droit international

• Du droit européen

• Du droit français

L’égalité dans le droit international

Sans reprendre l’intégralité des textes existants, il convient d’en citer les plus importants

1919 L’Organisation Internationale du Travail (l’OIT) inscrit dans sa convention « à travail égal, salaire égal ».

1951 La convention n°100 de l’OIT sur « l’égalité de rémunération » entre les hommes et les femmes.

1978 La convention n°111 de l’OIT qui prohibe les discriminations sexistes en matière d’emploi et de profession.

1979 La convention de l’ONU qui porte sur l’élimination de toutes formes de discriminations à l’égard des femmes.

L’égalité dans le droit européen

Historiquement c’est en premier lieu les femmes qui ont fait l’objet d’une protection du droit européen contre les discriminations. Aujourd’hui il n’existe pas moins d’une douzaine de directives européennes successives concernant l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes, la rémunération, la protection sociale, l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, les conditions de travail, la protection de la maternité et l’accès aux biens et services.

L’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes entre dans les politiques de l’emploi. Comme telles elles continuent de relever des Etats membres de l’Union Européenne. Cependant, les instances communautaires définissent une stratégie coordonnées pour l’emploi :

  Le conseil européen adopte à la majorité qualifiée les lignes directrices que doit emprunter la politique des Etats membres en la matière,
  Les Etats membres transmettent chaque année au Conseil un rapport sur les mesures prises pour mettre en œuvre les lignes directives

Les grandes dates à retenir au niveau européen, concernant l’égalité professionnelle sont :

1957 Traité de Rome. Il pose le principe de l’égalité de rémunération pour les travailleurs masculins et les travailleuses féminines pour un même travail.

1997 Traité d’Amsterdam. Il met l’égalité entre les hommes et les femmes au nombre des missions et objectifs de l’Union Européenne. Il réaffirme le principe de l’égalité de rémunération.

2000 Charte des droits fondamentaux. Elle réaffirme l’interdiction de discrimination et l’obligation de réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines.

2006 Jusqu’en 2006 il existait 13 directives européennes en matière d’égalité entre les hommes et les femmes. En 2006 une refonte de 7 des 13 directives « emploi » est opérée au sein d’un texte unique. Cette directive a pour objet de simplifier et d’améliorer la législation communautaire sur l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes en matière d’emploi et de travail.

Figurent notamment dans ce texte :
  Les concepts de discrimination directe, indirecte, de harcèlement fondé sur le sexe, de harcèlement sexuel,
  La protection renforcée des victimes de discrimination,
  Des dispositions sur l’accès à l’emploi, la promotion, la formation professionnelle, les conditions de travail, les rémunérations.

L’égalité dans le droit français

L’égalité des sexes est un principe d’ordre constitutionnel qui figure à l’article 3 du préambule de la Constitution de 1946 qui énonce :

« La loi garantit à la femme, dans tous les domaines les droits égaux à ceux de l’homme ».

L’article 1er de la Constitution de 1958 complété par la loi constitutionnelle du 23 Juillet 23 stipule :

« la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

Les grandes étapes de l’égalité en France

1804 Le code civil déclare que la femme est incapable juridiquement, elle est sous l’autorité de son père puis de son mari.

1836 Une ordonnance du 23 juin organise l’enseignement primaire pour les filles.

1907 La loi du 13 juillet accorde aux femmes mariées la libre disposition de leur salaire.

1924 Par un décret du 25 mars, les programmes de l’enseignement secondaire ainsi que le baccalauréat deviennent identiques pour les filles et les garçons.

1938 Les femmes peuvent s’inscrire à l’Université sans l’autorisation de leur mari.

1946 L’arrêté du 30 juillet supprime la notion de « salaire féminin » qui permettait d’appliquer un salaire moindre aux femmes pour un travail égal….

Historiquement le travail des femmes a d’abord été considéré comme un salaire d’appoint. Au début du siècle dernier, lorsque l’industrie fait appel aux femmes pour travailler en usine, leur salaire pouvait légalement être la moitié de celui des hommes.

1965 La loi du 13 juillet (réforme des régimes matrimoniaux) autorise les femmes à exercer une profession sans l’autorisation de leur mari.

1972 La loi du 22 décembre sur l’égalité des salaires Homme/Femme entre en vigueur.

1983 La loi « ROUDY » est mise en place. Elle impose aux entreprises d’effectuer un bilan de leur situation en matière d’égalité professionnelle et autorise des mesures de rattrapage afin de réduire les inégalités Homme/Femme.

2001 La loi du 9 mai dite loi « GENISSON » renforce la loi « ROUDY » en créant l’obligation de négocier au niveau de l’entreprise et des branches sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Elle prévoit que le rapport de situation comparée (RSC) doit comprendre des indicateurs reposant sur des éléments chiffrés.

La loi du 9 mai supprime l’interdiction du travail de nuit des femmes (directive européenne). Cette interdiction a été supprimée en vertu du principe d’égalité Homme/Femme.

La loi du 16 novembre améliore les protections des salariés vis-à-vis des discriminations en instaurant un aménagement de la charge de la preuve obligeant l’employeur à se justifier lorsqu’un salarié présente des éléments laissant supposer l’existence d’une discrimination.

2004 Accord interprofessionnel du 1er mars relatif à la mixité et à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Cet accord interprofessionnel a été signé par l’ensemble des organisations syndicales et patronales représentatives. Les signataires ont pris des engagements sur des actions concrètes comme :

L’évolution des mentalités par la communication en interne des entreprises, L’orientation pour un accès à toutes les filières, Le recrutement fondé sur les compétences, La formation professionnelle continue afin de favoriser l’évolution des salariés, La promotion et la mobilité pour une égale évolution de carrière, L’égalité des salaires.

Accord du 4 mai relatif à la formation professionnelle tout au long de la vie fixe comme objectif de négociation les conditions d’accès des femmes aux différents dispositifs de formation.

Charte de l’égalité. Elle entérine la notion d’égalité Homme/Femme La Charte égalité signé par les élus, les partenaires sociaux, les chambres consulaires, les réseaux associatifs, les pouvoirs publics consacre une partie des dispositions à l’égalité professionnelle à travers : La formation initiale, L’insertion professionnelle, La mixité des emplois en entreprise, La lutte contre les discriminations, Les éléments constitutifs de la carrière, La création d’activités, La protection de conjoints de travailleurs indépendants, Les femmes et le développement durable, La féminisation des noms de métiers

2006 La loi du 23 mars impose aux entreprises de négocier des mesures de suppression des écarts de rémunération avant la fin de l’année 2010.

Les principales dispositions de cette loi concernent :

La suppression des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes : Deux types de mesures sont prévus par cette loi :
  Les branches professionnelles et les entreprises d’au moins 50 salariés doivent négocier chaque année pour définir et programmer des mesures de suppression des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes avant le 31 décembre 2010 ; ces négociations doivent s’appuyer sur le rapport annuel de situation comparée.
  Un rattrapage salarial est prévu pour la personne qui rentre de congé maternité ou d’adoption

La conciliation entre l’activité professionnelle et la vie familiale : La loi impose aux entreprises de justifier dans le rapport annuel de situation comparée (RSC) des mesures mises en œuvre pour favoriser l’articulation entre la vie professionnelle et l’exercice de responsabilités familiales.

Elle prévoit également l’obligation de négocier sur les conditions de travail et l’emploi des salariés à temps partiel.

Le décret d’application du 18 octobre fixe la liste des indicateurs qui permettront d’apprécier l’articulation entre activité professionnelle et exercice des responsabilités familiales.

Le décret d’application du 29 novembre fixe les outils méthodologiques de suivi de l’application de la loi du 23 mars 2006 notamment UN TABLEAU DE BORD qui regroupe plusieurs indicateurs tels : les effectifs au 31 décembre de l’année en cours, la totalité des rémunérations annuelles déclarées à la sécurité sociale, le nombre d’heures de formation, la promotion d’un niveau à un autre, la répartition des embauches….

L’égalité de droit, les inégalités de fait

L’égalité professionnelle est un sujet qui interpelle car il renvoie à des expériences vécues par chacun. La voix des hommes s’est jusqu’ici peu fait entendre. Manque d’intérêt de leur part pour cette question ? Repli identitaire et relent machiste ? Sous-estimation des enjeux et bénéfices qu’ils pourraient tirer d’une meilleure égalité professionnelle ?

Ces constats en masquent d’autres : les hommes, tout comme les femmes, restent contraints par des stéréotypes de genre. Ces derniers perpétuent une répartition traditionnelle des rôles masculins et féminins entre la vie professionnelle et la vie personnelle.

C’est pourquoi, malgré les avancées notoires insufflées par les textes législatifs de nombreuses inégalités professionnelles demeurent :

 Taux de chômage plus élevé chez les femmes,  Ecart des rémunérations Hommes/Femmes entre 15 et 25 %  Accès plus difficile aux postes de décision pour les femmes  Concentration de femmes dans certains emplois (crèche, agents de nettoyage, etc…)  Temps partiel beaucoup plus souvent imposé aux femmes qu’aux hommes  Accès différencié des femmes à la formation continue.

L’égalité entre les hommes et les femmes devant l’emploi est une question complexe qui fait intervenir tout à la fois les questions d’orientation scolaires, la formation professionnelle, l’articulation des temps sociaux et implique l’ensemble de la société, Etat, collectivités territoriales, entreprises, associations, syndicats et citoyens.

L’entreprise ne peut être tenue de pallier à l’ensemble des carences de la société ; cependant les textes lui imposent d’assurer une veille active afin de ne pas reproduire en son sein les vieux stéréotypes liés au genre.

Face à cet état des lieux, des marges de progrès existent. Elles sont un formidable socle de négociations pour les partenaires sociaux au sein des entreprises.

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