LOI SUR L’EGALITE FEMME-HOMME : QUELLES AVANCEES POUR L’EGALITE PROFESSIONNELLE ?

, par udfo53

Définitivement adoptée le 23 juillet 2014, la loi n°2014-873 du 4 août 2014 « pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » comporte un certain nombre de dispositions relatives au champ professionnel. Les mesures sur le sujet sont contenues dans le Titre Ier : Dispositions relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes dans la vie professionnelle.

Egalité professionnelle : quelles sont les mesures à retenir ?

Même si, et c’est à déplorer, les écarts de rémunération ont encore de beaux jours devant eux, la loi introduit malgré tout certaines avancées.

- Dans les branches :

CLASSIFICATIONS : actuellement, les branches doivent se réunir tous les cinq ans pour examiner la nécessité de réviser les classifications, notamment au regard du principe d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. La loi ajoute à ce principe celui de mixité des emplois.

De plus, lorsqu’un écart de rémunération est constaté, les branches doivent désormais faire de sa réduction une priorité. A cet effet, la loi précise qu’à l’occasion de l’examen des classifications, les critères d’évaluation retenus dans la définition des différents postes de travail sont analysés afin d’identifier et de corriger ceux d’entre eux susceptibles d’induire des discriminations entre les femmes et les hommes et afin de garantir la prise en compte de l’ensemble des compétences des salariés. Il s’agit, entre autres, de mettre en pratique la notion d’ « un salaire égal pour un travail de valeur égale » et de veiller à ce que les classifications ne soient plus vectrices de discriminations indirectes.

FO est favorable au renforcement de l’obligation d’intégrer l’égalité salariale dans les négociations sur les classifications.

- Dans les entreprises : La loi introduit plusieurs évolutions applicables à l’échelle de l’entreprise, voici les principales :

NEGOCIATION : Une articulation entre la négociation sur l’égalité et la négociation annuelle obligatoire (NAO) relative aux salaires est établie par la loi.

Désormais, la négociation relative à l’égalité professionnelle doit définir et programmer les mesures permettant de supprimer les écarts de rémunération et les différences de déroulement de carrière entre les femmes et les hommes. Si un accord est signé, seul un suivi de la mise en œuvre de ces mesures est réalisé dans le cadre de la NAO salaire. En l’absence d’accord, c’est la NAO salaire qui les définit et les programme.

FO estime que l’intégration de la question salariale dans la négociation sur l’égalité professionnelle est intéressante.

RSC : la loi insère un nouveau champ d’analyse dans le rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes (RSC) : la sécurité et la santé au travail. Le RSC doit aussi analyser les écarts de salaires et de déroulement de carrière en fonction de l’âge, de la qualification et de l’ancienneté. De plus, il décrit l’évolution des taux de promotion respectifs des femmes et des hommes par métiers dans l’entreprise.

FO est satisfaite de la « sanctuarisation » du RSC complété des données de la base de données.

L’ajout d’indicateurs relatifs à la sécurité et la santé au travail répond à l’une de nos revendications.

***

FORMATION PROFESSIONNELLE CONTINUE : les actions de promotion de la mixité dans les entreprises, de sensibilisation à la lutte contre les stéréotypes sexistes et pour l’égalité professionnelle font maintenant partie de la liste des actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue.

RÉFORME DU CONGÉ PARENTAL : la loi institue un « partage » du complément de libre choix d’activité (CLCA), rebaptisé prestation partagée d’éducation de l’enfant, entre les deux membres du couple, pour les enfants nés (ou adoptés) à compter du 1er octobre 2014.

Six mois seront réservés à l’autre parent … ou perdus. Pour FO cette réforme vise donc surtout à faire des économies !

ENTRETIEN AU RETOUR DU CONGÉ : des précisions sont apportées à l’article L. 1225-57 du Code du travail concernant l’entretien au retour du congé parental d’éducation. « Au cours de cet entretien, l’employeur et le salarié organisent le retour à l’emploi du salarié ; ils déterminent les besoins de formation du salarié et examinent les conséquences éventuelles du congé sur sa rémunération et l’évolution de sa carrière ». Sur demande, l’entretien peut avoir lieu avant la fin du congé.

NAISSANCE ET PROTECTION DU SALARIÉ : un nouvel article (L. 1225-4-1) est inséré au Code du travail : « aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’un salarié pendant les quatre semaines suivant la naissance de son enfant ». Suite à une naissance, les pères sont donc aussi protégés.

Pour FO cette mesure va dans le bon sens.

AUTORISATION D’ABSENCE POUR EXAMENS MEDICAUX : dorénavant, le conjoint salarié de la femme enceinte peut bénéficier d’une autorisation d’absence pour se rendre à maximum trois examens médicaux obligatoires.

ÉVALUATION DES RISQUES : l’évaluation des risques tient désormais compte de l’impact différencié de l’exposition aux risques en fonction du sexe.

HARCÈLEMENT SEXUEL : avant la loi, l’employeur était tenu de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel. A compter d’aujourd’hui, il doit également prendre des mesures pour y mettre fin et les sanctionner.

PACS : le PACS ouvre désormais à 4 jours d’autorisation d’absence, comme le mariage.

COMPTE ÉPARGNE TEMPS : expérimentation visant à transformer une partie du CET en CESU.

FO n’est pas favorable à la monétarisation du CESU !

CONGES FAMILIAUX : « Après une concertation entre les partenaires sociaux, le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2014, un rapport portant, d’une part, sur une harmonisation des conditions d’ouverture et d’indemnisation des droits aux différents types de congés existants, tant parentaux que personnels, et, d’autre part, sur la portabilité de ces droits et le cadre de leur mise en œuvre. »

FO sera vigilante pour que l’ « harmonisation » et la « portabilité » se fassent au bénéfice des salariés …

Les autres champs concernés

L’égalité professionnelle ne constitue pas l’essentiel de la loi, des nombreuses dispositions couvrent d’autres champs de l’égalité entre les femmes et les hommes. En voici quelques-unes :

• Appui de la Banque Publique d’Investissement à l’entreprenariat féminin ;

• Protection et congés pour les collaboratrices/eurs libéraux pour la naissance d’un enfant ;

• Suppression de la notion de « situation de détresse » pour demander un avortement ;

• Renforcement des garanties contre les impayés de pensions alimentaires (expérimentation) ;

• Renforcement des mesures pour les victimes de violences ;

• Introduction des notions de harcèlement sexuel et moral dans le Code de la défense ;

• Attention portée sur la représentation des femmes, les stéréotypes… dans les médias ;

• Introduction de mesures relatives à la parité (dans les partis politiques, les CESER, les conseils des organismes de sécurité sociale, les conseils d’administration et de surveillance des établissements publics, les chambres d’agriculture, d’artisanat …) ;

• Instauration d’un rapport sur la situation en matière d’égalité dans les communes et établissements publics de coopération intercommunale de plus de 20 000 habitants, les conseils généraux et régionaux ;

• Interdiction de soumissionner à un marché public ou à un contrat de partenariat pour les entreprises ne respectant pas l’obligation de négociation ;

• Suppression de la notion de « bon père de famille » dans différents codes …

Bien que l’objectif annoncé par la Ministre des droits des femmes soit de « passer d’une égalité de droits à une égalité réelle », cette loi risque néanmoins de manquer de moyens concrets.

La réforme du congé parental, en particulier, nécessite l’augmentation et l’accessibilité, notamment financière, de l’offre de garde de jeunes enfants, ainsi qu’une meilleure compensation de la perte de rémunération, qui pourrait inciter davantage les pères à l’utiliser.

De plus, pour que les mesures relatives à la négociation soient réellement suivies d’effet, il est fondamental que des contrôles soient réalisés. Pour ce faire, les DIRECCTE et les inspecteurs du travail doivent impérativement disposer des effectifs et moyens nécessaires et non restreints. Ce qui est loin d’être le cas.

Sept 2014