Banques : malgré leurs profits et les aides de l’Etat, elles détruisent des emplois

, par udfo53

LCL, BNP, Société générale… Malgré leurs profits et les aides publiques massives de l’Etat à travers le Pacte dit « de responsabilité » et le CICE, ces banques suppriment des emplois et ferment des agences désormais en concurrence avec les services en ligne. FO revendique la mise en place de reconversions du personnel vers ces nouveaux services.

Les plans de suppressions d’emplois actuellement lancés par les banques françaises sont-ils au moins liés à une chute de leurs résultats financiers ? Même pas.

En 2015, les banques françaises (400 000 salariés dont plus de la moitié dans les agences) ont affiché un bénéfice cumulé de 15 milliards d’euros.

Cerise sur le gâteau, les paradis fiscaux les y aident. En 2014, elles y ont ainsi réalisé 5 milliards d’euros de bénéfices.

Des emplois détruits malgré les bénéfices exorbitants

Dans les paradis fiscaux ou non, BNP-Paribas a réalisé 2,55 milliards d’euros de bénéfice, en hausse de 13,7% sur un an. Il n’empêche. Elle supprime des agences : cinquante-deux depuis 2014.

Ce bénéfice de 2,55 milliards est la meilleure performance de BNP-Paris depuis 2009 estiment les spécialistes. Rien que d’avril à juin 2015, la banque a affiché des résultats en hausse de 15.8% à 11,1 milliards d’euros.

A la Société générale, le bénéfice a augmenté de 25% en 2015 à 1,35 milliard. Après un précédent plan lancé en 2012 et qui avait déjà supprimé près de deux mille emplois, la banque annonce un autre plan visant cette fois une économie de 850 millions d’ici 2 ans.

Ce plan s’accompagnera de la fermeture de 400 agences d’ici 2020 (soit 20% du réseau d’agences) et la suppression de plus de 2 500 postes.

Dans le détail le plan présenté par la Société générale consisterait à supprimer 2 000 emplois dans les agences via les départs à la retraite mais aussi, d’ici 2020, à supprimé 550 postes dans les backs-offices, ces services de traitements des données à distance qui emploient actuellement 3 250 salariés. Ces services seraient alors concentrés sur 14 sites contre 20 actuellement. Les backs-offices de Caen, Grenoble, Paris, Nancy, Nice et Rouen fermeraient.

Parallèlement, la Société générale, qui affichait un résultat de 1 126 milliards au troisième trimestre 2015, prévoit de consacrer 1,5 milliard à des investissements pour la technologie digitale d’ici 2020. Elle vient par ailleurs de racheter la banque en ligne Boursorama.

Chez LCL (groupe Crédit agricole), qui affichait en 2015 un résultat net de 565 millions et venait de supprimer 1 658 postes (10% de ses effectifs), la direction annonce la fermeture de 240 agences d’ici 2020.

Le 10 mars dernier, les syndicats ont claqué la porte du comité central d’entreprise. 350 à 400 emplois sont sur la sellette s’indigne le syndicat FO LCL. Pour ce nouveau plan qui vise à supprimer les petites agences, à moderniser les backs-offices (traitement des opérations à distances) en les spécialisant ou encore à créer de nouveaux centres de relation clients avec des plages horaire élargies, la direction annonce qu’il n’y aura pas de licenciements mais des « mobilités fonctionnelles et géographiques, des départs naturels et des départs en retraite ».

La manne des aides

La banque annonce 1 000 embauches par an jusqu’en 2018… Mais en comptant les départs, LCL aura en réalité perdu 1 000 emplois en 2018.

Malgré son résultat excédentaire, le directeur général du Crédit agricole, Philippe Brassac estime que « LCL n’a pas délivré les performances espérées ».

Et d’indiquer non sans cynisme qu’en 2019, « la banque sera beaucoup plus performante qu’aujourd’hui ».

Au total depuis 2014, les banques françaises ont déjà supprimé 3 000 postes sur le territoire et annoncent donc de nouvelles destructions d’emplois.

Or, ces banques bénéficient des aides de l’Etat. Elles engrangerons au total six milliards d’euros dans le cadre du Pacte de responsabilité et 300 millions au titre du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi mis en place en 2013 rappelle FO.

D’ores et déjà le CICE a profité pour 135,5 millions aux banques.

CICE et Pacte au service des marges

Entre 2013 et 2015, l’ensemble des entreprises françaises auront profité du CICE à hauteur de 18,6 milliards. En rythme de croisière, les entreprises devraient bénéficier de 20 milliards par an au titre du CICE. 30% des bénéficiaires du CICE sont des grandes entreprises (Chiffre d’affaires supérieur à 1,5 milliard d’euros) et 22% des ETI (entreprises de tailles intermédiaires (CA inférieur à 1,5 milliard).

Pour FO Banques, qui interpellait le chef de l’Etat en début d’année à propos de l’emploi, « il n’est pas acceptable que les uns empochent des millions voire des milliards et les autres subissent le chantage à l’emploi ».

En 2015 la BNP a ainsi réalisé 39 millions d’économies via le CICE (26 millions en 2014), la Société générale 28 millions (26 millions en 2014), la banque LCL 29 millions (18,5 millions en 2014).

Ces aides, censées compenser le coût du travail, n’ont pas profité à l’emploi mais ont servi à l’amélioration des marges des banques lesquelles, par ce biais, ont aussi financé leurs projets de création de services numériques.

Ces services dits de « banque numérique » (ex : application tablettes, code par SMS…) entrent désormais directement en concurrence avec les agences bancaires (37 000 en France, 250 000 salariés). Selon la fédération bancaire française (FBF), seuls 21% des français se rendent plusieurs fois par mois dans une agence bancaire contre 52% en 2010. La révolution numérique entrainerait ainsi une baisse de fréquentation des agences de 5% par an depuis près de 10 ans. Dans le monde indique de son côté l’agence Bloomberg les banques ont supprimé 600 000 emplois depuis 2008.

FO demande des reconversions

Or, l’une des revendications de FO Banque consiste à demander de « reconvertir les personnels dont le métier disparaît du fait du numérique et des nouvelles technologies justement vers les nouveaux métiers du numériques ».

Pour l’instant le patronat bancaire français préfère bénéficier des aides de l’Etat tout en détruisant les emplois. Les menaces sur l’emploi peuvent même être poussées à leur paroxysme…

La banque royale d’Ecosse (RBS) vient ainsi de mettre au travail un conseiller d’un genre particulier. Baptisé Luvo, ce conseiller virtuel est un droïde 100% autonome créé grâce aux technologies de l’intelligence artificielle.

Le robot guidera les clients dans leurs démarches en ligne. La banque assure qu’il dispose « d’une vraie chaleur humaine ». Qui en aurait douté ? Elle précise cependant qu’au cas où Luvo sèche sur une question, un conseiller en chair et en os reprendra le relais…