Augmenter les salaires, une priorité

, par udfo53

Pour Force Ouvrière, augmenter les salaires est une priorité. Les structures et les représentants FO se mobilisent pour une meilleure rémunération du travail. Des marges de manœuvre existent et les entreprises et le patronat dans son ensemble ne peuvent pas continuer à instrumentaliser le contexte économique difficile ou dégradé pour s’opposer aux revalorisations des salaires.

Le salaire reste un élément central du débat économique et social. Si la négociation sur l’ensemble des rémunérations (y compris épargne salariale et autres indemnités) n’est évidemment pas à négliger, le salaire doit rester la principale revendication. Dans ce cadre, le maintien du pouvoir d’achat passe par une revalorisation salariale au moins équivalente à l’inflation. Mais cette base minimale n’épuise pas, loin s’en faut, le sujet. Ainsi, la restitution aux salariés d’une part des gains de productivité réalisés par l’entreprise est un principe fondamental qui doit revenir au centre de la négociation. Tout aussi fondamental est le lieu où doivent être portées ces revendications. En l’espèce, Force Ouvrière reste profondément attachée aux négociations collectives de branche, surtout en cette période où celle-ci est menacée ou remise en question (tant par le patronat et le gouvernement que par d’autres organisations syndicales).

L’évolution des salaires est le meilleur moyen de redistribuer les richesses. C’est un moyen plus juste que la réduction de l’impôt qui profite surtout aux ménages les plus aisés. C’est aussi un levier collectif plus égalitaire que les autres formes de rémunération comme l’épargne salariale par exemple qui reste encore trop sélective, inégalitaire et aléatoire et qui privilégie l’individualisation – le rapport Cotis sur le partage de la valeur ajoutée (mai 2009) montrait par ailleurs combien l’intéressement et la participation occupaient une place très marginale dans la répartition réelle des profits et pointait le manque à gagner pour les comptes sociaux généré par ces dispositifs. Suite à l’annonce par le Chef de l’Etat, le 15 février 2010, d’un délai de 3 mois pour négocier sur la répartition des profits, Force Ouvrière n’entend pas laisser la question des salaires et du pouvoir d’achat enfermée dans ce thème imposé et rappelle la primauté du rééquilibrage de la valeur ajoutée en faveur de la part salariale.

Revendiquer l’augmentation des salaires, c’est aussi, de fait, militer pour sa part différée et donc défendre la protection sociale collective et les minima sociaux. En matière de financement des retraites et des pensions, un point de masse salariale supplémentaire représente 650 millions de recettes supplémentaires pour la seule CNAVTS (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Travailleurs Salariés), comme Force Ouvrière l’a rappelé lors du sommet social du 15 février dernier.

Mais l’augmentation des salaires n’est pas seulement une question de priorité sociale. Il s’agit aussi d’efficacité économique car le salaire est une variable déterminante de la consommation des ménages, donc de la demande intérieure et de la croissance (elle-même permettant la création d’emplois et l’augmentation des salaires). D’ailleurs, le gouvernement n’a-t-il pas lui-même loué le maintien de la consommation des ménages qui aurait valu à la France de moins souffrir que ses voisins en Europe durant la crise ?

Poursuivre dans la voie de la modération salariale n’est plus tolérable. Elle n’a déjà que trop duré. La faiblesse des salaires réels et leur déconnexion de la productivité a constitué en effet l’une des caractéristiques majeures du modèle économique libéral de ces vingt dernières années, un modèle profondément inégalitaire qui est la cause profonde de la crise historique que nous traversons.

Les conséquences de cette politique d’austérité salariale sont indiscutables sur un plan purement économique et statistique : décrochement du niveau de vie de certains salariés, notamment celui des employés et des ouvriers non qualifiés qui se retrouve très inférieur à celui du reste de la population, faiblesse du revenu salarial de plusieurs millions de travailleurs et augmentation corrélative et inquiétante du nombre de travailleurs pauvres en France, c’est-à-dire de ces travailleurs qui, bien qu’occupant un emploi, ne parviennent pas à dépasser le seuil de pauvreté et à subvenir à leurs besoins élémentaires (logement, alimentation, santé…).

La question qui reste essentielle est donc celle du prix du travail, du prix que notre système économique accorde à la valeur travail. Comme pour les retraites, la santé, les services publics, il s’agit d’une question de choix de société. Cette réalité du marché du travail français, celle d’une modération des salaires de nature structurelle et paupérisante, rend insupportable d’autres réalités comme, par exemple, les salaires des « grands patrons » (débat récurent au gré d’épisodes médiatiques réguliers). Sur le sujet, la passivité et la frilosité du MEDEF sont telles que l’Autorité des Marchés Financiers lui a demandé d’améliorer son « code de bonne conduite » en matière d’encadrement des salaires des dirigeants et de gouvernance d’entreprise.

Au-delà du caractère choquant des salaires de ces « grands » patrons, certains arguments traditionnellement objectés aux salariés pour refuser toutes revendications en matière d’augmentation de salaires ne tiennent plus aujourd’hui. Qu’il s’agisse en effet de la durée du temps de travail ou encore de la productivité des travailleurs français, des études parues récemment battent en brèche ces idées reçues d’une semaine de travail plus courte que celle des autres travailleurs des pays développés ou encore d’une productivité plus faible. De même, d’autres arguments comme ceux du coût du travail ou du poids des cotisations sociales pour justifier à posteriori la faiblesse de la croissance des salaires réels sont largement sujets à caution.

Dans ce débat, l’Etat en tant qu’employeur ne donne pas le bon exemple : l’évolution extrêmement faible du point d’indice des fonctionnaires, largement inférieure à l’inflation annuelle et ce depuis plusieurs années est inacceptable. Refuser en outre d’augmenter le SMIC au-delà du minimum légal (+0,5% en janvier dernier), c’est prendre le risque de tirer vers le bas l’ensemble des grilles de salaires qui lui sont plus ou moins directement arrimées.

1er mars 2010