1er Mai 2010

, par udfo53

Chers camarades,

La confédération générale du travail FORCE OUVRIERE adresse son salut fraternel à l’ensemble des salariés de France, d’Europe et du monde, en ce 1er mai 2010.

Le 1er mai, c’est d’abord une journée internationale de revendications. Cette année, compte tenu de la persistance pour les travailleurs de la crise et des projets nocifs du gouvernement, en particulier en matière de retraites, FORCE OUVRIERE a décidé d’une mobilisation plus forte que d’habitude. Le 1er mai, c’est aussi une journée de solidarité internationale avec tous les peuples qui subissent la répression, les attaques contre leurs conditions de travail, leur niveau de vie, quand ce n’est pas leur vie tout court.

Partout, où les peuples sont menacés dans leur quotidien, en Chine, en Birmanie, au Bénin ou en Colombie, les syndicalistes sont parmi les premiers à faire l’objet de mesures répressives. Mais partout, les salariés se battent et résistent, défendent leurs conditions de travail et leurs revendications.

Et pourtant ! Et pourtant, ils doivent faire face à une propagande plus virulente que jamais. Alors que depuis deux ans, nous subissons les conséquences de l’effondrement du marché immobilier et d’une crise du système. Alors que l’ensemble des pays du monde ou presque a plongé dans la récession. Alors que nous avons perdu des dizaines de millions d’emplois à l’échelle mondiale. Alors que les banques centrales, les Etats ont sorti des centaines de milliards pour renflouer le système bancaire et financier, et bien, mes chers camarades, les gouvernements, le G20, le FMI n’ont toujours pas pris les décisions permettant de dire : plus jamais ça !

Les bonus recommencent leur escalade et le CAC 40 va partager quelques 35 milliards de bénéfices entre ses actionnaires. La spéculation mondiale a repris de plus belle. Elle s’est déplacée sur d’autres marchés mais les bourses mondiales sont revenues à l’optimisme : les profits sont de retour !

Mais dans le même temps, les discours de tout le petit monde de la finance tournent autour du même sujet : les déficits publics !!

Les comptes publics sont en déficit, disent-ils ! Il faut revenir à l’équilibre, et pour cela, ils veulent tailler dans les dépenses sociales et dans les budgets publics.

En quelque sorte, l’argent public a aidé les capitalistes et c’est nous qui payons 2 fois : pour les aider et pour rembourser !

Les budgets publics, ce sont les services publics, l’administration du pays, les services publics républicains. Ils font partie de la république sociale. Mais pour le gouvernement, ce sont des coûts, et ces coûts, ils veulent sans cesse les réduire.

Alors pour cela, ils ont instauré depuis 3 ans la RGPP, la révision générale des politiques publiques. Chaque année, ce sont 10, 12 000 emplois en moins dans l’enseignement. Chaque année, plus de 30 000 postes en moins dans les administrations. C’est le regroupement de directions entières dans les préfectures de région, c’est la privatisation annoncée de La Poste, celle de France Télécom, GDF, etc.

Chers camarades, cette situation on pourrait la résumer comme suit : pour les vieux travailleurs, +0,9 % de revalorisation des retraites ; pour le prix du gaz, ce sera + 9 %.

Et dans les 2 cas, on vous dira que c’est la faute à la crise !

Mais cette crise, à quoi est-elle due ?

C’est une crise du système capitaliste, c’est une crise de la spéculation initiée par les banques et les fonds investissement. On a poussé des millions de familles américaines à acheter leur maison, même quand, de toute évidence, elles ne pouvaient pas payer. Et on a transformé des dettes en titres bancaires que toutes les institutions financières se sont repassées comme une patate chaude. La dette privée a explosé.

En un mot, les banques ont spéculé sur la ruine des petits propriétaires. Elles ont perdu des milliards et elles se sont fait renflouer par la réserve fédérale américaine puis, par contre coup, par les banques centrales des autres pays dont la Banque Centrale Européenne.

Et un fois renflouées, ces financiers ont le culot de venir critiquer le déficit des budgets publics, déficit qu’ils ont largement contribué à créer !!

Mais ce qui est le plus terrible, c’est que les gouvernements s’inclinent et s’attaquent aux déficits et aux comptes sociaux.

Alors, mes chers camarades, devons-nous tenir pour responsables de ces déficits les salariés actifs ou retraités ? Evidemment non !

En 2 ans, le chômage a explosé. Des plans de licenciement se sont multipliés des plus petites aux plus grandes entreprises. La Mayenne n’y a pas échappé. Certaines en ont d’ailleurs profité pour se restructurer ou même pour délocaliser, alors même qu’elles faisaient et font encore des bénéfices. LAHO, INERGY, VALEO…

Aujourd’hui, on nous dit que nous sommes sortis de la récession et que l’économie redémarre, mais pour la majorité des salariés la crise est bien toujours là ! Et malgré les discours du président de la République au G20, au Bureau International du Travail à Genève, la révision des pratiques douteuses du capitalisme, des bonus indécents et des stock-options, n’est pas à l’ordre du jour !

Mais ce qui est à l’ordre du jour, c’est le dossier des retraites et des pensions. Il y a 2 semaines le rapport du Conseil d’orientation des retraites était publié. Et comme on pouvait le prévoir, il nous a annoncé l’apocalypse pour demain. Les milliards ont valsé et un journal a même annoncé qu’il faudrait 2 600 milliards en 2050 ! Actuellement, le PIB, la richesse nationale est d’environ 1 800 milliards. Quand on lit cela, on comprend : les retraites c’est fini !

Et bien non, mes chers camarades, ce n’est pas fini ! Les jeunes d’aujourd’hui doivent pouvoir avoir confiance dans leur avenir et se dire qu’ils ne travaillent pas pour rien. Comment peut-on prétendre lire l’avenir à 40 ans de distance ? Comme si en 1947, quand les régimes de retraite ont été créés, on avait pu prévoir où on en serait en 1987. En 1947, les patrons hurlaient en disant qu’avec les cotisations sociales qu’on leur imposait, le pays serait ruiné en cinq ans !

Depuis la publication du rapport du COR, son auteur a d’ailleurs reconnu qu’on pouvait se tromper pour 2050. Sur une question qui engage la vie de millions de personnes, il n’est pas vraiment utile de jouer à Madame Soleil !

On nous dira que c’est vrai qu’il manque de l’argent pour boucler les comptes de la retraite. Mais, en lisant bien le rapport on s’aperçoit que c’est essentiellement la crise qui a aggravé la situation puisque, à elle seule, elle a augmenté de 20 milliards le besoin de financement pour 2015. Et si on regarde les années 2009 et 2010, c’est la crise qui a doublé le besoin de financement, autrement dit creusé le déficit.

Quoi d’étonnant quand près de 800 000 d’emplois ont été détruits pendant cette période, ce qui représente autant de cotisations en moins. En 2009, mes chers camarades, pour la première fois depuis la libération, la masse salariale a baissé. Est-ce que ce sont les salariés qui en sont responsables ?

Et puis, mes chers camarades, puisque nous sommes dans les chiffres, savez-vous combien la contre réforme Balladur de 1993 a coûté aux retraités ? 25 milliards ! Le passage de 37,5 à 40 ans, le passage du calcul sur les 10 meilleures années aux 25, l’indexation sur les prix au lieu des salaires, tout cela a privé les retraités de 25 milliards de revenus. Et que proposent MM. SARKOZY et WOERTH ? Aller encore plus loin ! Reculer l’âge de la retraite à 61 ans, 62 ans… ! Le Medef demande même 67 ans comme dans certains pays européens. Et ils proposent de continuer à allonger la durée de cotisation : 41, 42, 43 ans, et ça continuera si nous ne les arrêtons pas !

Pour FORCE OUVRIERE, c’est clair : 40 ans, c’est déjà trop ! Et la retraite à 60 ans n’est pas négociable !

L’enjeu aujourd’hui c’est le partage des richesses ! Depuis plus de 15 ans, 4 points de PIB ont été transférés de la masse salariale aux entreprises et, in fine, aux actionnaires, soit 80 milliards en 2009. Cela n’a rien à voir avec l’allongement de la durée de la vie. Mais cela a tout à voir avec l’injustice sociale et fiscale. FO propose une réforme fiscale qui répartisse mieux les richesses et préserve la masse salariale qui finance les retraites mais aussi la maladie et la famille.

La question des retraites relève d’un choix de société entre d’un côté une société solidaire, respectueuse des libertés individuelles et de l’autre une société individualiste irrespectueuse des libertés collectives et individuelles.

Préserver la répartition, garantir aux générations actuelles et aux jeunes générations la perspective d’une vraie retraite, suppose que l’on règle la question financière. Quand on parle de finances, on ne parle pas d’âge. La consolidation de la solidarité impose que l’on s’éloigne de l’absence de règles du capitalisme libéral. Il n’y a pas solidarité sans règlementation et sans droits et devoirs définis.

Il importe donc que l’on évalue les besoins financiers et que l’on décide des mesures nécessaires dans le respect de l’égalité et de la solidarité. Et qu’on ne dise pas qu’au nom de la concurrence et de la compétitivité on ne peut pas augmenter les prélèvements. On l’a bien fait pour toutes les victimes d’accident du travail, ce qui vaut pour les pauvres doit valoir pour les riches !

A FORCE OUVRIERE, nous avons dressé toute une liste de mesures financières et pénales permettant à court terme de régler le problème des retraites. C’est une question de choix, y compris de modifier le modèle économique et social à l’origine de la crise.

Oui, FORCE OUVRIERE considère que la question du financement se pose pour les retraites et que tout est une question de choix. L’ancien ministre du travail disait qu’il ne fallait pas avoir de tabou sur les retraites. Mais tout de suite, il excluait de toucher au financement : pas question, c’est la crise ! Mais prenons une des niches fiscales les plus juteuses, celle de l’exonération d’impôt pour les sociétés qui ont fait des bénéfices sur la vente de leurs filiales ou de leurs titres de participation. Ça représente 22 milliards sur 3 ans. 22 milliards de cadeaux aux actionnaires mais 30 000 postes de moins dans la fonction publique ! Et dans le même temps, 600 000 personnes sont au minimum vieillesse, c’est-à-dire à 700 euros par mois.

Et puis, mes chers camarades, à ceux qui nous disent : il faut travailler plus longtemps, FO répond : que l’on commence déjà par ne plus renvoyer les salariés âgés qui souhaitent rester et continuer à cotiser. Vous avez peut-être lu les résultats de ce sondage où l’on demandait à des chefs d’entreprise à quel âge il faut fixer le départ en retraite pour rétablir l’équilibre. Dans leur majorité, ils répondent 62, 63 ans. Et quand on leur demande si c’est le cas dans leur entreprise, la réponse est : Ah non, chez nous ce n’est pas possible, ils ne sont plus efficaces après 60 ans ! Que les salariés seniors puissent rester au boulot et cela améliorera déjà la situation !

Non, mes chers camarades, la retraite n’est pas un luxe. Certes, on vit plus vieux, mais pas forcément dans de meilleures conditions puisque l’âge moyen jusqu’auquel on vit en bonne santé est de 63 ans. Et il faudrait travailler jusqu’à 67 ans si on écoute le Medef !

Alors oui, mes chers camarades, le rapport du COR est bien un loup garou destiné à effrayer et à anesthésier les salariés. Car la question est bien celle-la : comment faire échec aux projets de MM. SARKOZY, WOERTH et TRON ? FORCE OUVRIERE l’a dit et répété. Il faut construire un rapport de force. Nous savons tous que dans leur écrasante majorité, les travailleurs rejettent l’idée d’un allongement de cotisation et d’un recul de l’âge de la retraite. Comment faire avaler à un salarié qui a toutes ses annuités de cotisation qu’il faudra qu’il attende 6 mois, un an, etc. avant de liquider ses droits ?

La question, c’est comment gagner ? L’année dernière, nous avons vu se succéder en janvier et en mars de puissantes manifestations, jusqu’à 3 millions de personnes, sur les revendications. Pourtant, le gouvernement n’a pas lâché et la mobilisation a faibli.

FORCE OUVRIERE, dans l’intersyndicale et hors de l’intersyndicale, a martelé : on ne peut pas faire céder le gouvernement sinon en appelant à une journée interprofessionnelle de grève franche de 24 heures.

C’est la seule solution pour bâtir un rapport de force crédible. C’est la raison pour laquelle Jean Claude MAILLY a pris la responsabilité d’écrire à ses homologues des autres confédérations pour leur demander s’ils seraient d’accord sur cette perspective.

Nous avons eu deux réponses : de Solidaires et de la CGT. Toutes les deux disent en substance : rejoignez l’intersyndicale d’abord, après on verra : Pas de salut en dehors du syndicalisme rassemblé.

Mais enfin, mes chers camarades, la question n’est pas d’être ou pas dans le même wagon ! La question est de savoir où il va ! Si l’an passé la mobilisation a faibli, c’est parce que les salariés en avaient assez des manifestations saute-mouton, des manifs procession, des manifs ricochets. Les salariés veulent des résultats, ils veulent maintenir la retraite solidaire, ils veulent le maintien des avantages familiaux, le maintien du Code des pensions civiles et militaires.

Pour FORCE OUVRIERE, cela suppose la clarté de la revendication. Le dossier des retraites et la question du financement sont la clé de voûte du système. Si le gouvernement continue de refuser de la traiter, s’il se contente de répartir la pénurie en retardant l’âge de la retraite ou en allongeant la durée de cotisation, il faudra bien que les organisations syndicales prennent leurs responsabilités. Certains pensent que la représentativité se gagne par des positions communes ou par des intersyndicales permanentes. Pas nous. Pour FO, il n’y a pas de G8 syndical car nous sommes une organisation indépendante qui prend ses responsabilités et c’est pourquoi nous n’avons pas appelé à un 1er mai dit « unitaire ». L’unité, c’est pour faire avancer les revendications, pas pour se tenir chaud !

Cette proposition, nous la maintenons car nos revendications valent bien une journée de grève interprofessionnelle :
  pour le financement des retraites,
  pour une vraie réforme fiscale,
  pour l’élargissement de l’assiette des cotisations,
  pour la compensation intégrale des exonérations de cotisations,
  pour l’augmentation des salaires.

Nous l’avons dit, la question des retraites, c’est la mère de toutes les revendications parce que l’assurance vieillesse, comme la Sécurité sociale, comme les services publics, tout cela est au cœur du système social, de ce que nous appelons la république sociale.

Défendre les retraites aujourd’hui, c’est une question de justice, de choix de société. C’est la défense d’un système solidaire contre l’individualisme et le chacun pour soi. C’est aussi prévenir les attaques contre tout le reste : l’assurance maladie, alors que les franchises et les déremboursements minent le système et menacent la prise en charge des maladies longue durée, les caisses d’allocations familiales qui croulent sous le manque de personnel, les salaires qui stagnent dans le public comme dans le privé.

Et, en application de la décision du Comité Confédéral National de FORCE OUVRIERE, décision prise à l’unanimité, nous réaffirmons que FO ne laissera pas voter une réforme des retraites contraire aux intérêts des salariés du public comme du privé, sans appeler à la mobilisation.

Alors, bien entendu, il y a beaucoup d’autres questions à régler : pouvoir d’achat, pénibilité du travail, logement, éducation…

A toutes ces questions, nous savons que le gouvernement répondra par la politique de rigueur budgétaire et le patronat par l’invocation de la crise.

Aussi, une seule solution : porter les revendications, les faire connaître, se faire entendre, se faire respecter !

Les salariés de ce pays ne sont pas battus et ils vont se faire entendre.

Aujourd’hui 1er mai, FORCE OUVRIERE s’adresse aux salariés de ce pays : avec vous, nous sommes prêts ! Constituez, renforcez vos syndicats et rejoignez nous, organisation libre et indépendante !

Et quoi qu’il advienne, FO prendra ses responsabilités ! Vive la solidarité internationale des salariés et des peuples ! Vive le syndicalisme libre ! Vive le 1er mai de revendications et de solidarité internationale ! Vive FORCE OUVRIERE !

1er mai 2010